Le Valais à Berlin invite Berlin en Valais
Berlin. Premier août 2002. Parc du Restaurant du Wannsee. Le Valais est l’invité de l’ambassade suisse pour la fête nationale. Parmi les artistes mandatés, veste de velours rouge et chevelure rousse, la plasticienne Floriane Tissières accroche, farfadet dans le crépuscule, ses lampions allumés aux branches du bois. Fleurs d’edelweiss, boules rouges incandescentes, croix blanches en accordéons jouent à dessiner d’improbables chemins où s’égarer derrière les buissons. Mais l’allée couverte qui mène au lieu choisi pour la fête nous retient. Un cheminement scandé de 6 édicules blancs qui vous happent au passage de leur fenêtre luminescente. Un regard et vous plongez dans la vision poétique d’une géographie recomposée où Berlin et les Berlinois visitent le Valais. Retournement créatif de l’invitation faite au Valais de se présenter à Berlin. Berlin invite le Valais en coiffant son Reichstag d’une boule de neige avec chien de Saint-Bernard. Approchez du second édicule et vous serez invités en retour à passer la porte de Brandeburg pour accéder sur la droite à l’ascension du Cervin. Encore un pas et les personnages du peintre allemand Caspar David Friedrich (1774-1840) s’arrachent à la contemplation des Falaises de craie de Rügen (vers 1820) pour s’engager sur une route suisse en quête du sud. Au passage de la quatrième boîte magique, l’ange de la paix dessiné en 1873 pour la Colonne de la victoire de la Place de la République s’attarde à prendre les eaux à Bienne sur le site d’Expo 02. Enfin les voilà ! Soucoupe volante de rêve, la coupole moderne du Reichstag, dessinée par l’architecte Norman Foster entre 1995 et 1999, déverse ses urbains sur le glacier alpin. Et Marlène Dietrich peut enfin partager le verre de l’amitié avec les valaisannes en costume de fête photographiées par Oswald Ruppen. Gracieuse invite à entrer dans une autre fête qu’animera plus tard dans la soirée le violon d’Anne-Sophie Mutter, la valaisanne de la Philharmonie de Berlin. Prenant appui sur la valeur symbolique du cadeau remis par le Valais à l’ambassadeur et son épouse (Thomas Borer et Shoane Fielding) lors de leur visite préparatoire à Sion en 2001, un sac de montagne et un chiot de la race Saint-Bernard, Floriane Tissières crée, par cette installation, un nouvel univers, synthèse virtuelle et virtuose de monuments, images et symboles identitaires des deux pays. Grâce à un astucieux jeu de miroirs, camera oscura revisitée, la machine à voir de Floriane Tissières rend possible la rencontre de deux cultures et construit un nouveau patrimoine, sorte de métaphore du métissage culturel qui rend possible notre proximité. Marie Claude Morand |